Une bêtise, vraiment ?

Nuage bleu avait quitté le camp, couru dans les hautes herbes, et à présent, elle se trouvait à la frontière avec le clan de la rivière, celui du vent, et des bipèdes. Au loin, le nid des bipèdes. Sa famille, ses premiers jeux, ses plans pour partir… Elle n’était pas malheureuse, loin de là, au clan du vent, mais elle voulait revoir au moins un membre de sa famille, surtout sa mère à laquelle elle devait tout. Sans elle, elle n’aurait jamais pu exister.
Au loin, deux chats de la rivière, vu leur forte odeur de poisson apportée par le vent, revenaient de leur frontière avec les bipèdes, plus loin. Ce devait être une patrouille de frontière ou de chasse. Nuage bleu les regarda s’éloigner puis baissa les yeux sur la rivière qui coulait devant elle. La dernière fois qu’elle avait tenté de la traverser, elle avait failli y laisser la vie, mais le pont était trop loin ; c’était plus court de passer par le clan de la rivière, et donc par la rivière, que par le pont ou les terres libres de la cascade. L’apprentie prit donc son élan, son souffle, et tout le courage qu’elle avait, puis se jeta dans l’eau glacée. Il n’y avait pas beaucoup à parcourir, mais il y avait du courant. Elle plongea et regarda passer un poisson. Le courant les emportait déjà tous les deux ; elle se mit à bouger des pattes du mieux qu’elle pouvait, y mettait toutes ses forces. Enfin, elle sentit le sol sous ses pattes, il remontait. Elle y planta les griffes pour continuer à avancer. Quelques coups de griffes plus tard, elle était sur la berge ennemie, haletante. Elle avait passé cette imposante frontière et maintenant, il fallait marcher sans être vue. Elle se tapit et commença à reprendre la marche.
Elle aurait été solitaire, elle aurait marché la tête haute. Pas de règles, pas de frontières, pas de chef ni de hiérarchie. Bien sûr, une vie de solitaire n’est pas simple. Eux aussi sont soumis à des lois aussi importantes que le code du guerrier, aussi strictes mais naturelles. Leur propres lois et l’organisation des clans tout autour d’eux, menaçants. Un sentiment de liberté, mais tout en s’emprisonnant avec la réalité, des faits idiots ou très complexes. Goutte elle-même, la solitaire la plus crainte, devait être soumise à de nombreuses lois, comme l’amour ou le temps qu’il fait et qui passe. Le bonheur devait lui appartenir à certains moments. Que lui arriverait-il si elle devait avoir une portée de petits ? Nuage bleu ne la connaissait pas, mais c’était une légende vivante, réelle. Elle aimerait bien la rencontrer un jour, elle arriverait sans doute à la comprendre.

Nuage bleu continuait de marcher, et sentait l'odeur des bipèdes se rapprocher. Pendant un instant, elle crut entendre des sanglots étouffés, au loin. Elle escalada donc un petit rocher pour mieux voir: elle se situait à présent à la frontière du clan de la rivière ! Il ne lui restait plus que quelques mètres à parcourir et elle arrivait à destination. Il lui fallait tout de même rester cachée, ce qu'elle avait oublié de faire durant quelques instants. L'apprentie descendit en vitesse de son petit promontoire, se plaqua à terre et fit la seule chose qui lui était possible de faire: espérer que personne ne l'ai vue. Comment savoir ? Soudain, elle frissonna: quelque chose, ou quelqu'un, avait bougé non loin d'elle, côté clan de la rivière. Une patrouille ? Ou une simple proie ?

[Une patrouille de la rivière sans Dorette ni Tigrette; un solitaire, ou sinon c'est un lapin.]

[J'ai du mal à situer l'endroit où se trouve Nuage Bleu... "Le nid des bipèdes", c'est la ferme, non ?]

Le lapin sautilla encore un peu, avant de s'immobiliser. Il ne se doutait encore de rien, et mâchonnait une fleur pour faire passer sa faim. Soudain, il sentit le danger. Tout proche, il était imminent. Son instinct reprit le dessus et il tenta de fuir, mais fut rapidement immobilisé par de grosses pattes blanches. Les dents de Perle de Lait se plantèrent dans son cou, et il eût une mort rapide.

La guerrière prit le lapin dans ses crocs et alla l'enterrer un peu plus loin, avec une musaraigne. Elle progressait assez vite dans la chasse, ce qui l'étonnait assez. Elle passait la plupart de son temps à pêcher à la rivière, et ne se rendait dans les terres que lors des patrouilles, rarement pour chasser. Mais elle se débrouillait bien, et ces quelques prises la changerait un peu des habituels poissons. Une fois le lapin enterré, elle se remit en route, cherchant une nouvelle proie. Un mouvement non loin l'interpela, et elle s'approcha doucement de l'endroit d'où il émanait. Alors qu'elle s'attendait à voir un petit oiseau ou un autre lapin, une odeur de chat mouillé lui sauta à la gorge. Mais que pouvait bien faire un chat de son clan aussi loin du camp, et trempé jusqu'aux os ? Alors, elle sentit l'autre odeur. L'intrus appartenait au clan du Vent. Mais que faisait-il aussi loin de son territoire ?

La chasseuse se redressa, la position de chasse n'étant plus utile dans la situation présente. Elle suivit la piste à pas feutrés, aussi silencieuse qu'une ombre. L'odeur était de plus en plus forte, signe qu'elle touchait au but. Mais qui était donc assez fou pour s'aventurer en territoire ennemi ainsi ? Alors, elle vit une petite chatte monter sur un rocher, et la guerrière blanche se plaqua au sol près d'un buisson. L'ennemi ne sembla pas l'avoir vu, mais elle redescendit aussi tôt de son perchoir pour se cacher elle aussi. Soit elle avait sentit son odeur, soit elle s'était rendu compte de son imprudence. En tout cas, l'intrus semblait plutôt jeune, sans doute une apprentie à la recherche de sensation forte. Perle de Lait allait remettre les pendules à l'heure, histoire que cette jeune chatte ne remette plus les pieds en territoire ennemi sans une excellente raison et une bonne escorte.

Se relevant, elle s'approcha de la cachette de l'autre chatte. A l'odeur, elle devina où elle se trouvait. Elle hésita quelques instants. Lui sauter dessus ? Ou l'aborder ? Attaquer ainsi, sans même tenter de savoir ce que faisait l'intrus dans les parages était contraire à ses habitudes, aussi opta-t-elles pour la seconde solution. Elle s'avança de façon à ce que l'autre puisse la voir et lança d'une voix abrupte:

-Que fais-tu ici, aussi loin de ton territoire ? Tu espionnait notre clan ? Montre-toi, et explique-toi !

[Oui, c'est la ferme des Morgan]

L'odeur du clan de la rivière se faisait de plus en plus nette, proche. Nuage bleu ne voulait pas se faire prendre... Habituée aux hautes herbes qui encerclent son camp, elle commença à se faufiler à toute vitesse entre les longs brins de la plaine de la rivière, en direction de son lieu natal, le nid des bipèdes. Mais déjà, un éclair blanc se fit apercevoir à trois longueurs de queue d'elle, et s'approchait encore. Comprenant qu'elle ne pouvait rien faire, Nuage bleu s'arrêta et s'assit, la tête basse.

-Que fais-tu ici, aussi loin de ton territoire ? Tu espionnait notre clan ? Montre-toi, et explique-toi !

Son cœur se mit à battre beaucoup plus vite, il lui fallait expire et inspirer plus profondément si elle ne voulait pas qu'il éclate. Devant elle se dressait à présent une guerrière du clan de la rivière, furax. Elle avait bien raison: elle venait de voir une apprentie entrer sur son territoire sans raison. Mais il y en avait bien une, de raison !!

- Je ...Je suis désolée. Je ne pensais pas me faire remarquer, je voulais juste passer de l'autre côté.

D'un coup, elle fut prise d'une envie de rébellion soudaine. Qu'avait ce chat à lui poser cette question ? Nuage bleu était innocente !! Elle rendait simplement visite à sa vraie famille. Au loin, d'autres sanglots étouffés se faisaient entendre. L'apprentie leva la tête et regarda sa rivale droit dans les yeux, essayant de ne laisser aucune trace de rage apparaitre.

- Ma famille est là bas.

[Le territoire de la Rivière est le seul accès à la ferme ? J'chuis vraiment pas douée en géo, moi >.<
Réponds en MP, je ferais mon RP en fonction (enfin, si tu connais la réponse)]

L'intruse était effectivement une apprentie, et elle semblait avoir compris qu'elle était en mauvaise posture. La tête basse, on entendait son coeur battre la chamade à plusieurs kilomètres à la ronde. Un sourire s'étira sur les lèvres de la chatte blanche. C'est toujours agréable de sentir qu'on domine la situation.

- Je ...Je suis désolée, bredouilla la jeune chatte. Je ne pensais pas me faire remarquer, je voulais juste passer de l'autre côté.

Passer de l'autre côté ? Suivant le regard de l'apprentie, Perle de Lait remarqua la ferme des Morgan non loin de là. Elle ne s'était pas rendue compte qu'elle-même s'était aventurée si loin. Mais qu'est-ce qu'une jeune apprentie du clan du Vent allait faire là-bas, chez les bipèdes ? La guerrière était bien décidée à tirer tout ça au clair. Reportant son regard sur la chatte ennemie, elle remarqua que son air désolé d'il y a quelques instants avait laissé place à une détermination farouche. Qu'est-ce qui avait bien pu provoquer ce revirement dans la tête de l'apprentie ?

- Ma famille est là bas.

Cette phrase avait été prononcée avec simplicité, et à son regard, Perle de Lait comprit que la chatte ennemie ne cherchait pas d'excuses. Elle disait la vérité. Sa famille ? Voilà qui était étrange. Était-elle une ancienne chatte domestique ? Ou bien ses parents avaient-ils décidés d'abandonner l'état sauvage ? Vraiment, cette chatte n'était pas nette...

La chatte écaille continuait à la toiser avec froideur. Mais pourquoi la fixait-elle ainsi ? Ce n'était pas la chatte blanche qui était en tort, elle était chez elle ! Bien déterminée à mettre un terme au malaise que lui procurait ces yeux froids, elle prit la parole.

-Ta famille, vraiment ? Tu n'es pas du clan du Vent, dans ce cas ? Tu as intérêt à me sortir quelque chose d'un peu plus crédible, ma pauvre, ou je vais être obligée de te traîner au camp et ça risque de ne pas être très agréable...

La guerrière n'était pas forcément méchante ni cruelle, mais elle avait beau savoir que son interlocutrice lui disait la vérité, elle avait envie de lui tirer les vers du nez. Sa curiosité satisfaite, peut-être qu'alors elle la laisserait passer...

-Ta famille, vraiment ? Tu n'es pas du clan du Vent, dans ce cas ? Tu as intérêt à me sortir quelque chose d'un peu plus crédible, ma pauvre, ou je vais être obligée de te traîner au camp et ça risque de ne pas être très agréable...

Nuage bleu secoua la tête d'un air exaspéré. Ce que les chats ennemis peuvent chercher les autres ! Enfin, ce n'était pas de sa faute si elle ne comprenait rien, cette pauvre guerrière blanche. L'apprentie se leva, puis se rassit plus confortablement, comme si elle allait raconter une histoire à un chaton. Peut-être que la guerrière serait-elle touchée par la sienne ?
- Je suis une véritable chatte du clan du vent, et ce clan est ma famille d'adoption, de lait et de jeux. Personne ne doit douter de ma loyauté ! J'aime mon clan.
Elle se rappelait sa détermination farouche à devenir un vrai chat du clan du vent, durant ses premières lunes là-bas, avec son frère aveugle et sa sœur très calme, eux vraiment issus du clan du vent; et même quand elle traversait la rivière pour la première fois pour quitter ses terres natales, du haut de ses deux lunes, alors qu'elle savait à peine ce qu'était un clan. Mais très vite elle fut acceptée par les chats qu'elle aimait, et n'eut plus beaucoup de preuves à donner. Cependant, sa véritable famille lui manquait, et elle revenait chez elle pour la première fois. C'est ça qu'elle avait à expliquer à cette guerrière qui la regardait avec impatience.
- Mais je suis née là bas, dans ce nid de bipèdes, et je sais que ma mère y est toujours. Je n'ai que sept lunes, mais je voudrais la revoir maintenant, car je ne lui ai jamais dit au revoir. Elle ne sait pas ou je vis et j'aimerais le lui dire. J'aime ma mère, car c'est elle qui ma donné la vie pour que j'en fasse ce que j'en ai fait: vivre parmi les chats de clan.
Au fur et à mesure qu'elle parlait, Nuage bleu se rendait compte à quel point elle devvait revoir sa mère, sa pauvre mère qui la croyait sûrement morte depuis longtemps -cinq lunes-.

L'apprentie secoua la tête et se réinstalla, bien décidée à raconter son histoire. Espérons qu'elle en vaille la peine...

- Je suis une véritable chatte du clan du vent, commença-t-elle, et ce clan est ma famille d'adoption, de lait et de jeux. Personne ne doit douter de ma loyauté ! J'aime mon clan.

Elle marqua une légère pose, comme pour se remémorer tous les événements qui l'avaient menés où elle en était à présent. Puis, d'une voix posée, elle reprit:

- Mais je suis née là bas, dans ce nid de bipèdes, et je sais que ma mère y est toujours. Je n'ai que sept lunes, mais je voudrais la revoir maintenant, car je ne lui ai jamais dit au revoir. Elle ne sait pas ou je vis et j'aimerais le lui dire. J'aime ma mère, car c'est elle qui ma donné la vie pour que j'en fasse ce que j'en ai fait: vivre parmi les chats de clan.

Perle de Lait retint quelques remarques cinglantes, et elle eût envie de répondre ironiquement "Comme c'est touchant...". Mais elle ne le fit pas. Pourquoi ? Peut-être parce que cette histoire la touchait réellement. Après tout, était-ce la faute de la jeune chatte si elle était née parmi la bipèdes, et non dans un clan comme la guerrière blanche ? Mais la chose qui lui échappait était pourquoi elle avait quitté sa mère. L'avait-elle abandonnée ? Dans ce cas, pourquoi vouloir la revoir ? Décidément, l'histoire de cette jeune chatte recelait bien plus de mystères qu'on aurait pu le croire au premier abord...

-J'espère que tu ne compte pas repasser par là à chaque fois que tu souhaite lui rendre visite, où ça risque de t'attirer de sérieux ennuis.

En parlant d'ennuis, une question vint soudain à l'esprit de la guerrière. Que devait-elle faire de l'intruse ? Elle l'aurait bien laissé partir maintenant qu'elle en savait plus sur elle, mais... Peut-être serait-il plus prudent de la ramener au campement et de laisser Etoile Tigrée décider. Il serait étonnant qu'un clan ait chargé une apprentie aussi jeune d'espionner un clan ennemi, aussi son histoire était parfaitement crédible. D'autant plus que si elle rentrait chez elle en sentant aussi fort le clan de la Rivière, elle risquait de leur devoir des explications également et d'être punie pour son imprudence.

-Bon, eh bien je n'ai plus vraiment de raisons de te retenir plus longtemps... Je te laisse passer pour cette fois, mais si tu te fais attraper par une autre patrouille, je doute qu'elle soit aussi clémente. Et la prochaine fois que je te vois dans les parages, je t'emmène devant Etoile Tigrée, compris ? Alors j'espère que c'est la dernière fois qu'on se voit dans ces conditions...

Elle ne put s'empêcher de glisser un clin d'oeil à l'autre chatte, qui lui était maintenant plutôt sympathique. Elle pensait pourtant réellement ses paroles, et si jamais leur chemins devaient se croiser de nouveau sur ce territoire... Eh bien, la chatte blanche ne répondait plus de rien.

[Désolée, j'ai rien trouvé pour faire durer la conversation... Si t'as quelque chose à ajouter, vas-y ^^]

- [...] Alors j'espère que c'est la dernière fois qu'on se voit dans ces conditions...

Nuage bleu n'avait pas tant que ça la sensation de peur que devrait éprouver un intrus. Selon elle, elle avait parfaitement raison de se retrouver ici... Peut-être devrait elle remettre les choses au clair une fois arrivée en territoire autorisé, elle était apprentie au clan du vent, juste au clan du vent. Elle s'inclina légèrement devant la guerrière blanche qui commençait déjà à partir en guise de merci. Elle n'aurait pas voulu se retrouver devant Étoile tigrée...
L'apprentie se relava et repartit à toute vitesse vers le grand nid de bipède que se dressait au loin. Elle repensait déjà à sa mère, ses frères et sœurs ... Elle ne voulait revoir que sa mère, ses frères et sœurs étant des traîtres, des chats ayant accepté la présence et la soumission aux bipèdes. Au loin, elle entendait toujours des sanglots, mais moins forts.
J'aimerais bien savoir qui pleure. Je pense que c'est un chat ... Elle repensa aux deux chats du clan de la rivière qui retournaient vers leur camp qu'elle avait vus en grimpant sur son petit promontoire, avant d'être repérée. Mais ils devaient être loin à présent. Trop loin pour être entendus.